Equation de Fermat pour
Par Mathous
Objectifs de l'équation
On veut démontrer que l'équation n'a pas de solution dans l'ensemble (autre que les solutions triviales où l'un des nombres serait nul).
Il existe de nombreuses démonstrations de ce résultat. Celle qui a été choisie ici fait largement appel aux propriétés de l'anneau étudié dans mon article sur les entiers d'Eisenstein.
Pour plus de détails, voyez cet article.
Elle s'inspire largement du cours de Monsieur Hindry : qu'il en soit ici remercié.
I- Résultats et prérequis
Commençons donc par rappeler les propriétés utiles, et quelques autres que nous allons établir ici.
est un anneau euclidien, donc principal, donc factoriel.
Ses unités ( éléments inversibles ) sont exactement les éléments de norme 1 :, , .
L'élément , de norme , est un irréductible (élément premier) de .
Dans un anneau factoriel, on dispose de la propriété suivante que nous utiliserons dans cette étude :
Si et sont deux éléments premiers entre eux d'un anneau factoriel, et si leur produit est le produit d'un cube par une unité, alors chacun d'eux est le produit d'un cube par une unité.
En effet : posons et où et sont des unités de l'anneau, et des éléments irréductibles, et les exposants de ces facteurs dans les décompositions de et . Puisque et sont premiers entre eux, les sont tous différents des .
, étant une unité.
Or, la décomposition de étant unique (à l'ordre près et aux inversibles près), les et les sont exactement les avec leurs exposants qui sont tous des multiples de .
Donc et sont bien des cubes (aux unités près).
Ce résultat s'étend sans difficulté (même démonstration) à un produit de plus de 2 facteurs pourvu qu'ils soient premiers entre eux deux à deux.
, et même , est un diviseur de :
En effet :
soit .
On a :
Soit .
On pose où et sont des entiers relatifs.
puisque .Donc .
est donc congru à un entier. Or, , cet entier est congru à ,, ou .
Mais puisque est un multiple de , est congru à ,, ou .
Plus précisément, le quotient est un corps puisque l'anneau est principal et que est premier.
Ce corps possédant éléments est donc isomorphe à .
Une autre façon d'expliquer les choses est de remarquer que, par division euclidienne de par , est congru modulo à son reste qui est de norme inférieure à .
Or il n'existe pas dans d'élément de norme . Donc est congru soit à , soit à un élément de norme c'est-à-dire à un inversible.Mais ces inversibles sont en fait congrus à modulo :
et , les premiers n'étant pas congrus aux seconds.
On retrouve bien les 3 classes.
Si est une unité ( élément inversible ) de et que , alors .
Remarquons que cet énoncé serait faux si on supposait seulement : par
exemple mais .
La démonstration de la propriété s'effectue par cas ( il n'y en a finalement que 4 ).
- si :
-
ou bien , donc , donc , donc est un multiple de ce qui est impossible.
-
ou bien , donc , donc , donc $-j^2 est un multiple de ce qui est impossible ( de norme ).
- si :
-
ou bien , donc $j^2 \equiv 1 modulo \lambda^2, donc $j^2-1 \equiv 0 modulo\lambda^2, donc est un multiple de ce qui est impossible.
-
ou bien , donc est un multiple de , donc est un multiple de ce qui est impossible.
- si :
-
ou bien , donc , ce cas a été étudié.
-
ou bien , donc , cas également étudié.
- si :
Là aussi, les deux cas ont été étudiés.
Il reste donc comme seules possibilités : ou pour lesquels il n'y a évidemment rien à vérifier.
Si élément de vérifie , alors .
Si , alors ( où ).
Donc
Or, modulo , est congru à un entier valant ,, ou .
est donc congru à et à (car .
Chacun des facteurs du produit est donc congru modulo à un entier de à , et ces entiers étant différents modulo, l'un d'entre eux est donc congru à ,c'est-à-dire est un multiple de .
Par suite, et donc .
Si , un calcul analogue au précédent fournit .
Comme précédemment, l'un des trois derniers facteurs est multiple de et on obtient .
II - Considérons maintenant, dans \{0}, l'équation .
-
On peut toujours supposer que ,, et sont premiers entre eux ( dans ) car si est un PGCD de ,, et , il suffit de poser , y = \deltay', . On obtient alors où cette fois ,, et sont premiers entre eux.
-
On peut même supposer que ,, et sont premiers entre eux deux à deux car si est un diviseur premier ( dans ) de et , il divise aussi donc $z (puisqu'il est premier et que ) ce qui contredit que ,, et sont premiers entre eux.
-
Si ne divise ni , ni , ni , alors chacun de ces éléments est congru à ,
et donc le cube de chacun est congru à .
Par suite, puisque , on a :
Il est aisé de vérifier qu'une telle congruence est impossible : le membre de gauche étant congru à ou de norme maximum , alors que
est de norme .
Il en résulte que divise l'un des éléments ,, ou .
L'égalité peut s'écrire .
Par suite, , , et jouent le même rôle, et puisque divise l'un des éléments ,,ou , on peut toujours supposer qu'il divise .
,, et étant premiers entre eux deux à deux, divise donc mais ni ni .
- En définitive, on peut donc se placer dans la situation suivante :
, , et sont trois éléments de \{0}, premiers entre eux deux à deux, tels que
et tels que divise mais ni ni .
Nous allons démontrer que ceci est impossible, et donc à fortiori que l'équation n'admet aucune solution dans \{0}.
Méthode de la descente infinie
On se place dans l'hypothèse suivante :
,, et sont trois éléments de \{0}, premiers entre eux deux à deux, tels que divise mais ni ni , et tels qu'il existe une unité de telle que .
- Puisque divise mais pas ni , et sont congrus à . On a vu qu'alors et sont congrus à .
Donc, puisque , on a \pm1 \pm 1 ≡ uz^3 modulo \lambda^4$.
Donc :
ou bien , et donc est un multiple de donc de ( puisque divise ), ce qui est faux ;
ou bien , ce qui est également impossible ;
reste donc , et donc est un multiple de ce qui implique que est un multiple de ( et pas seulement de ).
- Si est un diviseur commun de et de , alors divise . Il
divise aussi .
Or, et étant premiers entre eux, divise donc .
Ainsi, un PGCD de et de divise .
- On a : .
Or, divisant divise donc le produit . Il divise donc au moins un de ces trois facteurs.
Si divise , il divise donc , il divise donc . Il divise
donc un PGCD de ces deux éléments.
Or on vient de voir que ces PGCD divisent . Donc est un PGCD de et .
- On démontrerait de façon analogue que est un PGCD de et de ainsi que de et . C'est donc un PGCD des trois facteurs.
On peut remarquer d'ailleurs que ces trois facteurs jouent le même rôle : il suffit par exemple de poser pour obtenir à la place de , à la place de , et à la place de ;
,, et vérifiant évidemment les conditions demandées au début de cette partie.
- On a vu plus haut que divise , donc est de la forme où est
la valuation de dans la décomposition de en facteurs premiers ( le plus grand exposant de
dans cette décomposition ).
On a donc .
Par suite, puisque , et donc l'un au moins des
trois facteurs , , ou est divisible par .
Or on a vu que ( et non pas ) est un PGCD de ces facteurs pris deux à deux. Il en résulte qu'un seul de ces facteurs est divisible par et les deux autres seulement par .On ne change rien à la généralité du problème en supposant que c'est qui est divisible par . Le raisonnement aboutirait au même résultat si on supposait que c'est un des deux autres facteurs ( on a d'ailleurs vu que ces trois facteurs jouent le même rôle ).
On suppose donc dans la suite que , , et .
De plus, puisque , on a ( la somme
des exposants valant ).
- On a donc :
Puisque \lambda est un PGCD de ces éléments deux à deux, il en résulte que , , et sont premiers entre eux deux à deux.
Or, le produit des trois vaut , il en résulte que ., , et sont donc trois éléments de \{0}, premiers entre eux deux à deux, et dont
le produit est un cube ( à une unité près ).
étant un anneau factoriel, il en résulte que
chacun de ces trois éléments est lui-même le produit d'un cube par une unité.Il existe donc trois unités , , , et trois éléments , , et de tels que :
On calcule alors :
Puisque :
On peut tout diviser par qui est une unité :
On pose alors :
et
On obtient alors où et sont des unités, et des éléments de \{0} premiers entre eux, non divisibles par , et où la valuation de est ( alors que celle de était ).
Mais ce n'est pas encore tout-à-fait ce que l'on souhaite : est une unité, mais il faut prouver que c'est .
- Puisque et ne sont pas divisibles par , ils sont congrus à , et donc et y' ^3 sont congrus à donc à fortiori $modulo\lambda^3 $.
est un multiple de donc est congru à .
Il en résulte que et à fortiori .
Or, cette congruence n'est possible que si . Ainsi, si valait , on aurait multiple de ce qui est impossible ( à cause par exemple des normes ).
Je laisse au lecteur le soin de vérifier les autres impossibilités.
On a donc \varepsilon = \pm 1$.
Donc, on obtient lorsque , ou lorsque .
Résumé
En résumé :
s'il existe trois éléments , , de \{0}, premiers entre eux deux à deux, et une unité de * ,
tels que divise mais pas ni , et que ,
alors il existe trois éléments ,, de \{0}, premiers entre eux deux à deux, et une unité de * ,
tels que divise mais pas ni , et que , avec de plus .
On peut itérer le procédé indéfiniment : les valuations dez qui sont des entiers à priori positifs mais strictement décroissants finiraient par être nuls voire négatifs : cela aboutit donc à une contradiction :
L'hypothèse initiale : il existe trois éléments , , de \{0}, premiers entre eux deux à deux, et une unité de * , tels que divise mais pas ni , et que est donc fausse, et par suite l'équation n'admet aucune solution dans autre que celles où un des termes est nul.